mercredi 24 octobre 2012

Le boulot d'éduc' au CMPP de Bé

   Un p'tit clin d’œil aux P9, aux formateurs, à tous les potes travailleurs sociaux, et à tous ceux qui se sentiront concernés...

  Comme je vous le disais dans l'article précédent, il y a une soixantaine d'enfants de 6 à 20 ans qui se rendent chaque jour au CMPP de Bé. Certains sont autistes, d'autres psychotiques, ou encore trisomiques, et avec une sur-représentation des enfants atteints d'infirmité motrice cérébrale. Cela tient en partie du manque de moyen dans les CMS où la plupart des accouchements ont lieux. En effet on a remarqué ici récemment que dans certains quartiers où les accouchement avaient lieux au chalumeau, sans électricité, une surpopulation des enfants handicapés de 0 à 10 ans était présente: tous avaient manquaient d'oxygène à la naissance.
Tous les matins les enfants se rangent par groupe. Ils chantent l'hymne Togolais, et rentrent en classe sur un rythme militaire, un vrai rituel.

l'heure de la bouillie!

De la sieste!


     Aujourd'hui au centre il y a deux éducateurs qui se répartissent le groupe d'enfants. 25 chez les plus petits,  35 chez les plus grands. Cette prise en charge en "surnombre" pousse les jeunes à l'autonomie et à l'entraide. Ainsi, alors qu'il n'y a pas d'agent au ménage, à la vaisselle, au service..., ce sont les plus grands, aidés des plus petits parfois, qui se chargent des tâches du quotidien. A leur tour, les plus petits sont pris en charge par les plus grands lorsqu'ils ne sont pas encore propres, capables de manger seuls...Biensûr tout n'est pas parfait et souvent les actes de violences sont présents, les injustices aussi. Mais on ne peut tout voir à 2.
quelques grands attendent pour servir les plus petits

     L'autre côté du "surnombre", moins positif, est que la prise en charge qui souvent "devrait" être individuelle, ne peut l'être. La mise en place d'activités même de groupe est souvent impossible, tellement le groupe est hétérogène et le personnel réduit. Donc les séances bien souvent se transforment en gardiennage pur et simple, où chacun est prié, à la baguette, de rester assis et de ne pas trop embêter les autres.  Comment se positionner professionnellement dans de telles conditions?

     Au début j'ai du mal à ne pas me sentir frustré dans ce trop de "laisser faire", qui ressemble plus à du "rien faire" avec obligation forcée de ne pas bouger. Je me réfugie alors dans le "vivre avec", le "rien faire avec"!
Lorsque je suis arrivé le premier jour, Agathe la directrice me prévenait d'emblée que l'utilisation du bâton allait peut-être me choquer, "toi européen". Et bien elle avait raison. Mais pour autant il est facile parfois, lorsque 30 gamins parlant une autre langue, courent et crient sans interruption, se frappent, se roulent par terre, de prendre le parti du bâton, de faire régner par la douleur et la peur. Mais on s'y refuse aussitôt, et on se dit qu'on vivra mieux une lutte acharnée, sans fin et plus trop d'espoir, plutôt que ça.
Corneille, éducateur sur le groupe des grands, et Préname, une volontaire étudiante.

Six enfants de notre groupe ne mangent pas seuls, une quinzaine aurait besoin d'un éducateur pour un enfant. Nous sommes deux. Deux à leur courir après, à refermer les portes, à les empêcher de se frapper, de s'assommer. Deux  à nous faire mordre, griffer, taper et cracher dessus. Deux à y croire, à mette en place des activités, que parfois un ou deux va saisir.

Préname, Mireille, psychologue en fin d'étude et en stage au CMPP, et Agathe.
     Heureusement les volontaires viennent prêter main-forte, pour se faire une expérience souvent, ou tout simplement par charité. Ils ne sont pas toujours présents mais lorsque c'est le cas ils allègent considérablement l'encadrement et la gestion du groupe.

     Le CMPP est ouvert de 7h00 jusqu'à 15h00, ou 12h00 les mercredi et vendredi. Mais la journée des éducateurs s'arrête bien au delà, parfois jusqu'à 20h00 car les parents "oublient" régulièrement de venir chercher leurs enfants. cela arrive chaque jour malgré les sanctions, les renvois. Car le CMPP de Bé reçoit particulièrement les enfants de familles les plus démunies, les moins averties en matière de handicap, et les plus dures à associer à la prise en charge. Des rencontres avec les parents devraient être organisées d'ici peu, afin de les sensibiliser au handicap de leurs enfants, de les aider dans l'accompagnement du quotidien.

Vous avez bien-sûr le droit  de réagir, j’attends même un peu de vos réactions! à bientôt

9 commentaires:

  1. coucou
    et bien sacré courage, bravo les éducs, psy, et autres volontaires !!
    difficile aussi pour des parents d'avoir des réactions adaptées le ventre vide !
    les croyances n'aident en rien l'évolution des mentalités ! les réunions de sensibilisation au handicap, dialogue et infos semble le meilleur moyen pour faire avancer les comportements
    l'argent a toujours été le nerf de la guerre !
    sacré expèrience arthur
    sur que les projets éducatifs individuels deviennent des projets de vie
    le masturbage de meninges, réunionite aigue et le manque d'actions concretes de certaines institutions, voir du gouvernement vont t'apparaitre comme des dérives encore plus inacceptables... mais ne devenons pas trop exigeant il ya chez nous aussi beaucoup de professionalisme et de bonnes volontés
    des bisous

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  2. Bonjour à toi et merci pour ta réaction!
    peut on connaître ton identité?

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  3. coucou Arthur,
    je te dit bravo il doit te falloir beaucoup de courage pour supporter tout cela, ton séjour est dur au droit pour la vie.Fait attention et continue a donné des nouvelles les photos que tu envoies sont toujours aussi belle et quel courage ils faut aux personnelles qui encadres.je te fait pleins de bisous Mamie

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  4. et bah putain, ne n'aurais jamais cru que le handicap était si mal vu et si mal considéré par l'État mais surtout par les familles!!! Ca donne envie de vous rejoindre pour aider!! Je comprends que tu ais eu du mal à te positionner, si peu de moyens et tant de manques!!! Bon courage à toi et à tous ceux qui luttent pour une meilleure reconnaissance et un meilleur accompagnement de ces enfants qui pourraient avoir un avenir!!!!
    Des bise, à très vite,

    Marie en direct de Charsac sous la neige!!!!

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    1. Salut Marie!
      Oui c'est hallucinant ces représentations qui freinent tout le travail...ici il fait toujours entre 35 et 40°C, on sue nuit et jour! Je sens néanmoins l'appel de la neige comme une envie d'aller skier bientôt! ça commence à faire drôle un été qui dure autant!
      des bises à Alex

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  5. Mon gars Arthur, la pertinence de tes mots dépeignent bien le sérieux de la situation dont tu es témoin là-bas !... Tous les paramètres que tu énumères (handicap et acceptation, surnombre et déficit d'encadrement, démission des instances...), ça ressemble à ... à "avant"... L'avant de tout pays aujourd'hui développé qui fut, encore récemment, une société arriérée...

    Ce que tu racontes est tellement brut... élémentaire-à-terre...
    Le rejet est logique, surtout quand on l'habille de traditions, de superstitions (les "mamans coupables", "bien entendu" !)...
    Nous sommes des humains d'aujourd'hui, et le temps n'est pas si loin de nos propres barbaries, de notre propre bêtise...

    Ce que tu racontes me touche parce que je me reconnais dans tout le monde : L'enfant, handicapé ou non... L'éduc'/infirmier et ses moyens de fortune... L'élu local qui "sait même pas" qu'il doit se sentir concerné... Le parent qui violente ou qui culpabilise (des fois, les deux en même temps)... La culture de ce "qu'il convient de faire", du bien, du mal...
    Et pis l'occidental qui s'prend sa claque de concret !...

    Tes deux dernières "chroniques" m'ont bien chauffé... C'est quand qu'on en discute, copain !?... J't'embrasse très fort !... Et passe le bonjour à ceux que tu aimes là-bas !...

    _ Tristan _

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    1. Salut mon Tristan! ah tu me réchauffes à ton tour en mettant des mots sur ce que je ressens depuis Truinas!! la connexion, c'est bon!
      vivement qu'on en discute autours d'une bonne Markus, comme tu le dis!plein des bises et à trés bientôt!!

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  6. coucou mon arturo!!!ça faisait un bail que je t'avais pas lu,... mais notre nouvelle vie nous prend du temps et ça fait du bien de lire toutes ces choses même si elles révoltent, elles nous remettent à notre place, nous et notre confort social et tout et tou en france. Je vais pas trop parler de tout ça on aura le temps de refaire le monde autour d'un jaune... continue bien tout ça et reste intègre c'est l'essentiel dans ces lieux là... je t'aime fort prend bien soin de toi et d'eux.. mayé

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  7. Salut Ruya c'est Khalid et boujmàà,

    On est espère que malgré les difficiles conditions de travail, tout va bien pour toi !
    Garde les oreilles debout !
    Khalid il dit (je transcrit littéralement) voir la réalité en face ça fait du bien des fois pour les gens qui ont la capacité et la force et je penses que tu en fais partie.
    J'espère que ça va être une belle expérience, je pense à toi ruya, bisous.

    Quant à moi que dire de plus ? Je ne vais pas te raconter les péripéties de la fosse septique de la maison, fais moi signe si tu veux que l'on ouvre ton courrier pour vérifier qu'il n'y a rien d'urgent. Nouvelles de mon côté: j'ai réussi les z'écrits, et je vadrouille pas mal entre Beaujolais, Greu, Auvergne et bientôt Italie.
    Tous mes encouragement et mes meilleurs souhait pour la suite ! Des bises !

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